Valoriser la profession enseignante, une solution urgente et durable
9 octobre 2020
S’il est vrai qu’enseigner est l’un des plus beaux métiers du monde, il est aussi vrai qu’il s’agit d’une profession exigeante. Malheureusement, la profession enseignante est souffrante. La dévalorisation dont elle fait l’objet depuis de trop nombreuses années en est la cause principale. Un symptôme bien visible est la pénurie d’enseignantes et d’enseignants. Celle-ci perdure depuis quelques années et est maintenant exacerbée par la crise sanitaire que nous vivons.
Pour régler son problème de manque de personnel, un centre de services a récemment tenté de recruter des personnes suppléantes en ayant pour seule exigence que les candidates et candidats détiennent un secondaire 5. Cette solution ainsi mise de l’avant ne vient en rien valoriser la profession enseignante. Bien au contraire! Avec une telle solution, ce centre de services scolaire fait un pas de plus sur le chemin de la dévalorisation et risque d’aggraver le problème.
Soyons clairs, je n’ai rien contre ces personnes qui auraient envie de relever le défi. J’en ai contre ce système érigé sur un manque flagrant de vision à long terme, contre ces comportements répétés qui viennent renforcer l’idée que n’importe qui peut enseigner. Quel message envoie-t-on à l’ensemble de la société? Convainc-t-on la population qu’il nous faut plutôt du personnel qualifié pour le bien des élèves? Quel message envoie-t-on à ces jeunes qui pensent choisir l’enseignement comme carrière ou encore qui étudient en ce moment dans une faculté de sciences de l’éducation? Les encourage-t-on à poursuivre dans cette voie? Poser ces questions, c’est y répondre!
La pénurie est bien réelle, nous avons besoin de renfort. Les centres de services scolaires, les commissions scolaires et le ministère doivent s’assurer que les personnes recrutées soient encadrées et acquièrent les notions pédagogiques essentielles à l’enseignement sans toutefois se laisser séduire par les solutions faciles.
De plus, il faut prendre soin des enseignantes et enseignants actuellement en poste afin qu’ils y restent. Alors qu’ils croulaient déjà sous la tâche, la pandémie vient ajouter à leurs responsabilités en plus de leur demander des ajustements constants. Notamment, ils pallient les retards pris par certains élèves lors du confinement du printemps, se préparent à passer à l’enseignement à distance et doivent expliquer les nouvelles mesures de sécurité. Il y a fort à parier que ceux-ci devront, par-dessus le marché, accompagner les suppléantes et suppléants ainsi embauchés. Ils sont déjà surchargés, il est donc essentiel que du temps leur soit dégagé pour ce faire.
Le gouvernement doit poser des gestes concrets afin de valoriser la profession enseignante et ainsi juguler l’hémorragie et attirer la relève. Parmi plusieurs options possibles, s’assurer que l’autonomie professionnelle est respectée est un bon exemple qui ne nécessite aucun investissement. En effet, les enseignantes et enseignants l’ont mentionné à maintes reprises, la confiance accordée et leur autonomie professionnelle sont primordiales dans leur sentiment de valorisation. Le contexte de la crise sanitaire permet une fois de plus d’illustrer des lacunes importantes à ce chapitre.
En effet, alors que les recommandations des experts de favoriser le télétravail lorsque les tâches le permettent se multiplient, plusieurs centres de services scolaires et commissions scolaires résistent et obligent encore les enseignantes et enseignants à se présenter à l’école même s’ils ne sont pas en présence élèves; les reléguant ainsi à un rôle d’exécutant plutôt que de les traiter en professionnels.
Si l’on veut diminuer les risques de propagation, il faut les réduire à la source et limiter les contacts entre les personnes. Exiger des profs qu’ils se présentent à l’école lors d’une journée pédagogique, pour compléter leur temps de nature personnelle ou pour toutes autres tâches qui ne se réalisent pas en présence élèves est un non-sens et les expose davantage, de manière irresponsable, à un risque important.
Pour protéger la santé de ses membres, la FSE-CSQ est intervenue vigoureusement afin que les centres de services scolaires et les commissions scolaires appliquent les recommandations de la CNESST et de l’INSPQ. Des précisions à cet effet ont, heureusement, été envoyées plus tôt cette semaine. Il est urgent que les centres de services scolaires et les commissions scolaires appliquent les recommandations et fassent preuve de gros bon sens. Ils doivent faire confiance aux profs. Ils doivent les laisser utiliser leur jugement pour évaluer si leurs tâches et leur horaire leur permettent de travailler de la maison. Les profs sont les mieux placés pour prendre cette décision.
Valoriser réellement la profession enseignante, c’est faire confiance aux profs. La valorisation se vit, oui dans le système et son fonctionnement, mais aussi au quotidien dans chaque décision prise et chaque geste posé par les dirigeants scolaires. Plusieurs, dont le ministre au premier chef, soulignent l’importance de valoriser la profession enseignante. Leur volonté doit maintenant se refléter dans les mesures mises en place. Au-delà des paroles, il faut maintenant agir!
La FSE-CSQ mène cette bataille depuis de nombreuses années. Elle n’abandonnera pas, parce que redonner les lettres de noblesse à la profession enseignante est vital, pour les enseignantes et enseignants, mais aussi pour tout le Québec.