Rapport sur la composition de la classe – Un petit bijou que le ministre doit mettre à profit

24 février 2023

En poste depuis quelques mois à peine, le ministre de l’Éducation Bernard Drainville, qui a répété à plusieurs reprises qu’il était sur le terrain pour bien comprendre les besoins et qu’il tendait la main aux partenaires de l’éducation pour travailler avec eux, aura besoin de poser des gestes concrets pour nous prouver qu’il a réellement entendu la grande souffrance des enseignants et qu’il souhaite travailler à la réussite de tous les élèves du réseau scolaire. Fin janvier, il nous dévoilait ses grandes priorités pour l’éducation, sans toutefois proposer de solutions concrètes aux différents problèmes auxquels il désire s’attaquer.

Dans les derniers jours, le ministre n’a eu d’autre choix que de ralentir le rythme, pour la troisième fois en 4 ans, sur l’une des promesses phares de son gouvernement en éducation. Je parle bien sûr de l’implantation mur à mur de classes de maternelle 4 ans. Pour plusieurs acteurs du milieu de l’éducation, à commencer par la FSE-CSQ, ce recul était prévisible et inévitable, notamment en raison des pénuries de main-d’œuvre et de locaux qui frappent dans presque toutes les régions de la province. Mais tout n’est pas perdu pour le ministre de l’Éducation : lorsqu’il souhaite faire bouger les choses, que ce soit au sein de son ministère ou encore au Conseil du trésor, nous le savons capable d’y parvenir. Nous l’avons constaté avec sa décision sur les maternelles 4 ans ainsi que par son refus de donner suite à la proposition de la Fédération des centres de services scolaires du Québec (FCSSQ) d’ajouter deux élèves par groupe comme « solution » à la pénurie.

Un rapport qui appuie nos demandes

S’il souhaite faire la démonstration qu’il est à l’écoute des besoins des enseignantes et enseignants et qu’il est prêt à agir concrètement pour leur donner de l’air, M. Drainville vient de mettre la main sur un petit bijou : le rapport du conciliateur Jean-Guy Ménard. Celui-ci découle des travaux du comité paritaire sur la composition de la classe, obtenu par la FSE-CSQ lors de la précédente ronde de négociation nationale.

Que dit ce rapport? En gros, il vient appuyer nos revendications en lien avec l’enjeu important qu’est la composition des groupes. Me Ménard est clair : il y a urgence d’agir, puisque cette problématique est « éminemment préoccupante » et que la composition de certains groupes est « excessive et inacceptable ». Il suggère donc d’intervenir, au moins dès juin, pour éviter de composer des groupes à « défis particuliers ». Il affirme aussi que cette situation a des conséquences négatives importantes sur les élèves et le personnel qui se retrouvent dans ces classes au quotidien.

Selon le conciliateur, il est clair que des éléments comme le nombre et la complexité des plans d’intervention, la présence d’élèves en non-redoublement ou en modification des attentes ainsi que la présence d’élèves HDAA doivent être pris en compte lors de la composition des classes. C’est ce que nous disons à la partie patronale depuis des années.

Le rapport écarte aussi complètement le discours de la partie patronale sur l’inclusion de tous les élèves en classe ordinaire. Selon Me. Ménard, l’intégration des élèves HDAA devrait être faite de façon à ce que la tâche de l’enseignante ou de l’enseignant se rapproche le plus possible de ce qu’elle serait sans l’intégration d’élèves à besoins particuliers.

Un rapport qui tombe à point

La publication de ce rapport, qui démontre toute la pertinence de nos revendications en lien avec la composition de la classe, arrive à un moment où cet enjeu est au cœur de l’actualité et de la négociation nationale des profs.

On apprenait d’ailleurs, mercredi, que le gouvernement souhaite ajouter des aides à la classe dans environ 15 000 classes du Québec. Dommage que cette annonce n’ait pas été faite à l’endroit où elle aurait dû l’être, aux tables de négociation. Les projets d’aide à la classe auxquels la FSE-CSQ a participé donnent des résultats prometteurs au primaire, mais ils sont loin de régler tous les problèmes liés aux compositions de classes déficientes. C’est en amont, lors de la formation des groupes, qu’un effort doit être fait pour offrir des classes équilibrées aux profs et à leurs élèves. Comme toujours, la FSE-CSQ sera présente pour faire part de ses préoccupations aux représentants patronaux, pour autant qu’ils utilisent les bons canaux pour en discuter.

En terminant, je porte à votre attention une phrase très intéressante du rapport Ménard, qui montre bien que la FSE-CSQ a su faire la démonstration de la détresse vécue dans les milieux en lien avec la composition des groupes. Le conciliateur dit avoir le sentiment que « les enseignantes et les enseignants ont autant besoin d’aide que le modèle d’intégration en place a besoin d’air ». C’est vrai. Souhaitons que le gouvernement, Bernard Drainville et Sonia LeBel en tête, sauront faire le même constat dans le cadre de la négociation actuelle.

 

Josée Scalabrini, présidente de la FSE-CSQ