L’équité salariale des enseignantes

26 octobre 2001

La durée du travail, le coeur du différend

Québec, le 26 octobre 2001 – La rencontre de mercredi entre les syndicats qui représentent le personnel enseignant et les porte-parole du Conseil du trésor et du ministère de l’Éducation a donné la mesure du fossé qui sépare les parties dans le dossier de l’équité salariale des enseignantes et enseignants. La question de la reconnaissance des heures travaillées reste au cœur du différend, mais la valeur de l’emploi et le caractère unique de la catégorie demeurent aussi en suspens, à moins d’un mois de l’échéance légale. La partie syndicale croit toujours en la possibilité de régler le différend avant l’échéance du 21 novembre.

Au sortir de la rencontre, la partie syndicale composée de Diane Fortin, coordonnatrice de la Centrale des syndicats du Québec dans le dossier de l’équité salariale, de Louise Chabot, vice-présidente de la CSQ, responsable politique du dossier, de Johanne Fortier, présidente de la Fédération des syndicats de l’enseignement (CSQ) et de Réginald Sorel, président de la Fédération des enseignantes et enseignants de cégeps (CSQ) a tenu à réitérer que la question de la reconnaissance de la durée du travail est une spécificité de la catégorie d’emploi enseignante et qu’elle fait intimement partie du dossier de l’équité salariale.

Le porte-parole du gouvernement, Marcel Gilbert, a d’ailleurs reconnu que si la question générale des heures de travail pouvait se discuter dans d’autres forums, comme celui de la négociation traditionnelle, dans le cas des enseignantes et enseignants les discussions en cours sur la durée et la valeur de l’emploi d’enseignement sont évidemment intimement liées au processus pour leur assurer l’équité salariale.

Une astuce trop facile

«Il serait trop facile pour n’importe quel employeur de retirer d’une main ce qu’il donne de l’autre, si, après avoir établi à peu près correctement la valeur de l’emploi il pouvait se hâter de nier, arbitrairement et faussement, la véritable durée du travail, pour diminuer d’autant la rémunération. C’est une astuce grossière qui viderait de tout son sens l’application de la Loi sur l’équité salariale» a commenté Louise Chabot, responsable politique du dossier.

Les enseignantes et enseignants ne peuvent tout simplement pas tolérer qu’une fois que le gouvernement ait fini par reconnaître qu’ils travaillent au moins autant que leurs collègues, il tente maintenant de diminuer un éventuel ajustement au titre de l’équité salariale sous prétexte que tout le temps qu’ils mettent à l’ouvrage ne serait pas requis. Le gouvernement s’aviserait-il de diminuer la rémunération de ses ingénieurs, par exemple, sous prétexte qu’ils pourraient probablement, selon lui, s’acquitter de leur travail en moins de 35 heures par semaine? C’est pourtant le raisonnement qu’il tient sans ciller aux enseignantes, du préscolaire au collégial !

Même si le gouvernement a finalement reconnu que l’étude conjointe de 1996 avait été réalisée selon une méthodologie appropriée, et constitue une démarche valable, le porte-parole gouvernemental a néanmoins proposé la poursuite de travaux à caractère exploratoire pour échanger sur la façon de déterminer le temps requis pour effectuer la tâche enseignante, sans vouloir s’engager dans un échéancier précis. La partie syndicale voit dans cette proposition une nouvelle façon pour le gouvernement de gagner du temps, mais elle se résout à cet ultime exercice, en précisant son échéance au 20 novembre 2001. Après cinq années de tergiversations, l’employeur doit être capable d’indiquer rapidement à quelle enseigne il loge dans la reconnaissance de la durée du travail enseignant.

Petit rappel sur la spécificité enseignante

Dans le cas des enseignantes et enseignants, les travaux réalisés en 1996 pour mesurer la valeur de l’emploi se sont accompagnés, à la demande de l’employeur, de travaux pour mesurer la durée réelle du travail d’enseignement. Les heures «conventionnées» prévoient le temps en classe, une partie du temps à l’école ou dans l’établissement scolaire, mais pas la préparation de cours, la correction, la préparation des plans d’intervention, les mises à jour, etc. L’étude réalisée dans le cadre d’une démarche d’équité salariale avec l’employeur, étude vérifiée, épurée, validée et revalidée n’avait d’autre but que de vérifier que les enseignantes et enseignants ne travaillaient pas moins d’heures sur une base annuelle que leurs collègues du secteur public à qui il fallait les comparer pour réaliser l’équité salariale entre les catégories d’emploi chez l’employeur gouvernemental.

Une échéance à respecter

Pour Johanne Fortier, présidente de la FSE, comme pour Réginald Sorel, président de la FEC, l’échéance du 21 novembre 2001, doit être respectée. C’est celle qui est prévue à la Loi sur l’équité salariale à laquelle font référence les lettres d’entente sur la poursuite des travaux en équité salariale annexées aux conventions collectives des enseignantes et enseignants. L’emploi d’enseignement devra avoir été rangé au même niveau que les emplois équivalents du secteur public, à qui on a octroyé le rangement 21, et sans dévaluation imputable à une notion arbitraire et spécifique de «temps requis».


La catégorie d’emploi

Les porte-parole de la CSQ et de ses fédérations ont aussi réaffirmé leur conviction, basée sur les travaux réalisés, que l’emploi d’enseignement ne constituait qu’une catégorie, au sens de la Loi sur l’équité salariale, du primaire au collégial. Il y a bien sûr des différences minimes liées à la population desservie, mais le tronc commun des tâches est largement prépondérant. Si on a considéré dans le passé, à juste titre, que la catégorie d’emploi d’infirmière dans tout le réseau de la santé et des services sociaux était unique, que les infirmières soient affectées en salle d’urgence ou à un centre de soins de longue durée, il ne devrait pas y avoir d’objection à ne reconnaître qu’une catégorie d’emploi d’enseignement.

Pour la CSQ, ce sont toutes les enseignantes et tous les enseignants, du préscolaire au collégial, qui doivent continuer de faire l’objet de la démarche actuelle et être considérés faire partie de la catégorie enseignante. Le gouvernement devrait maintenir la logique qui a prévalu au moment de l’entente provisoire de 1999 en équité salariale, alors que toutes les enseignantes et tous les enseignants, du préscolaire au collégial, étaient admissibles aux ajustements salariaux provisoires à valoir au titre de l’équité salariale.

Les travaux de la dernière chance

Parce qu’elle est convaincue du bien-fondé de ses positions, tant sur la durée de l’emploi que sur sa valeur et la catégorie unique, la partie syndicale accepte de s’inscrire dans la poursuite de travaux intensifs d’ici les prochaines semaines, pour respecter l’échéance du 21 novembre et assurer un résultat acceptable d’équité salariale pour les enseignantes et enseignants.

«Le gouvernement doit donner l’exemple. Il doit régler le dossier de l’équité salariale des enseignantes, de façon correcte, avant l’échéance qu’il fixe à tous les employeurs du Québec pour la réaliser, dans moins d’un mois. Autrement, nous devrons conclure que ses beaux discours sur la justice dans la rémunération des femmes ne sont que cela» a conclu la porte-parole de la CSQ, Louise Chabot.


Pour information :

Louise Rochefort, CSQ, 514-235-5082
Jean Laporte, FSE, 418-563-7193