L’avis du CSE sur l’aménagement du temps à l’école secondaire

5 avril 2001

Une idée généreuse mais utopique

Québec, le 5 avril 2001. – Commentant l’avis émis hier par le Conseil supérieur de l’éducation « Aménager le temps autrement : une responsabilité de l’école secondaire », la présidente de la Fédération des syndicats de l’enseignement, Johanne Fortier, a dit souscrire aux objectifs d’assujettir l’organisation du temps aux impératifs pédagogiques, mais s’est étonnée du climat utopique qui enrobe l’étude du CSE. La principale recommandation de l’avis, le décloisonnement d ‘une partie du temps scolaire, du propre aveu du CSE, repose sur une impression : « C’est le décloisonnement d’une partie du temps scolaire, destiné à la réalisation de projets multidisciplinaires ou de projets personnels de l’élève, qui semble être l’enjeu de la majorité des projets éducatifs mis en place pour le mieux-être des élèves ».

La présidente de la FSE qui regroupe les 75 000 enseignantes et enseignants des commissions scolaires francophones du Québec tient aussi à rappeler que le Ministère de l’éducation n’a pas encore déterminé comment s’implantera la réforme des programmes au secondaire. « On ne pourra pas se contenter de faire du « copier-coller, à partir de ce qui se fait au primaire », a-t-elle ajouté. « Que le Conseil rappelle, et nous en sommes, que l’organisation scolaire doive être centrée sur les besoins d’apprentissages des élèves, c’est une chose, mais de proposer comme solution ultime le décloisonnement d’une partie importante du temps nous apparaît abstrait, décroché des contingences matérielles, qu’on ne peut éliminer simplement en le souhaitant. »

Les syndicats de l’enseignement ont déjà témoigné leur ouverture à considérer des modèles différents d’organisation du travail. Une étude avait même été réalisée en 1993, qui répertoriait et évaluait les nombreux scénarios d’encadrement des élèves. Mais l’appréhension des syndicats à ce moment reste aujourd’hui la même, de voir les organisations scolaires profiter de ces ouvertures pour réduire le niveau des ressources et des services. Une telle avenue ne reste donc envisageable qu’avec la garantie d’avoir des ratios maîtres-élèves, qui en contrepartie permettent une organisation du travail plus éclatée.

Il faut aussi constater que c’est maintenant une majorité des écoles secondaires du Québec qui offre des projets particuliers de tous ordres, et que les praticiens qui les proposent et les mettent en place n’ont pas ciblé jusqu’ici les contraintes de temps comme un obstacle majeur. Le niveau des ressources humaines et financières continue de nous apparaître comme beaucoup plus problématique.

L’avis du Conseil supérieur de l’éducation s’inscrit aussi à contre-courant d’une nouvelle donne dans la formation des maîtres. Après être passée de la formation uni-disciplinaire il y a plusieurs années, à la formation dans deux ou trois disciplines, la révision des critères de formation des maîtres nous ramène plutôt ces temps-ci à une formation mono-disciplinaire, au moins pour les principales matières de base.

La recommandation du CSE de décloisonner le temps d’enseignement, telle que formulée et appuyée, nous semble donc relever plus de la pensée magique que d’une démonstration sérieuse. Les contraintes administratives dans des établissements de l’ampleur de nos écoles secondaires ne sont pas des facteurs qu’on peut gommer en proposant simplement un « assouplissement » qui risquerait de ne plus permettre d’atteindre les objectifs fixés par les programmes. Faut-il rappeler la nécessité évidente de recentrer les programmes sur la maîtrise des matières de base, comme le français et les mathématiques, et l’obligation d’un encadrement national de nature à assurer une certaine équité dans les apprentissages offerts aux élèves québécois.


Pour information :

Jean Laporte
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