La Recommandation de l’UNESCO confirme les failles de notre système d’éducation

4 octobre 2006

La CSQ et ses fédérations de l’enseignement réclament un sérieux coup de barre

Montréal, le 4 octobre 2006 –  » Le système d’éducation au Québec glisse sur une pente inquiétante. La Centrale des syndicats du Québec (CSQ) et ses trois fédérations d’enseignement, la Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE), la Fédération du personnel de l’enseignement privé (FPEP) et la Fédération des enseignantes et des enseignants de cégep (FEC) saisissent l’occasion de la Journée mondiale des enseignantes et des enseignants et l’approche d’une campagne électorale pour réclamer des chefs politiques au Québec qu’ils s’engagent, si leur parti forme le prochain gouvernement, à donner un sérieux coup de barre pour remettre sur ses rails le système d’éducation au Québec. « 

Accompagné des présidentes de la FSE et de la FPEP, Mmes Johanne Fortier et Francine Lamoureux, et du président de la FEC, M. Mario Beauchemin, le président de la CSQ, M. Réjean Parent, a profité de la Journée mondiale des enseignantes et des enseignants, qui se déroulera demain, pour dévoiler une liste d’engagements essentiels qui doivent être pris pour revaloriser la condition enseignante au Québec et la qualité de l’éducation.

 » Nous célébrons cette année le 40e anniversaire de l’adoption de la Recommandation de l’UNESCO sur la condition du personnel enseignant. Cette déclaration établit une liste de conditions essentielles reconnues universellement pour assurer l’établissement et le maintien d’un système d’éducation de qualité. Cela passe par des conditions incontournables dont certaines font maintenant défaut au Québec. Ces conditions tournent autour de la nécessaire valorisation de la profession enseignante et de l’amélioration des conditions de travail des enseignantes et des enseignants. Faute de quoi, la pénurie d’enseignantes et d’enseignants ira en s’aggravant avec toutes les conséquences qui en découlent sur la qualité de notre système d’éducation « , déplore M. Parent.

Des indicateurs qui confirment le recul

Le président de la CSQ rappelle quelques indicateurs qui confirment un certain recul de notre système d’éducation. Le taux de diplomation en 1995-1996 pour les jeunes du secondaire avant 20 ans était de 73,4 % alors qu’il est descendu à 70,4 % en 2003-2004, donc un recul important de 3 points. Rappelons que les États généraux sur l’éducation prévoyaient pour 2010 un taux de diplomation de 85 %. De plus, l’enquête internationale sur les mathématiques et les sciences TEIMS 2003 réalisée par la IEA (International Association for the Evaluation Achievement) montre que le Québec qui se situait au 4e rang (parmi 15 pays et 2 provinces) en 1995 pour les mathématiques se retrouve au 11e rang en 2003. Le Québec est même celui qui a connu la plus forte détérioration de sa performance.

La situation est identique pour le domaine des sciences alors que le Québec qui se situait au 4e rang en 1995 se retrouve au 11e rang en 2003. Encore là, à l’exception de la Norvège, le Québec enregistre la plus forte détérioration de sa performance. Bref, l’enquête TEIMS 2003 révèle une diminution importante des résultats pour les élèves de 4e année du primaire qui ont vécu la réforme comparativement à ceux des élèves qui avaient bénéficié des anciens programmes d’études en 1995.

Une réforme qui complique la condition enseignante

M. Parent croit que ces indicateurs ne sont pas surprenants puisque les enseignantes et les enseignants sont obligés de pratiquer leur profession sans bénéficier des ressources professionnelles et financières nécessaires. Ils doivent également conjuguer avec une réforme de l’éducation dont l’implantation est venue compliquer davantage la condition enseignante. Il suffit de mentionner que le taux d’intégration des élèves en difficulté dans les classes ordinaires au secondaire est passé de 33 % en 2001-2002 à 43 % en 2003-2004. La tâche des enseignantes et des enseignants s’alourdit toujours plus alors qu’il n’y a aucun ajout de ressources.

La présidente de la FSE, Mme Johanne Fortier, renchérit en expliquant qu’il est temps de se rendre à l’évidence que la réforme ne produit pas les résultats escomptés, que les élèves ne réussissent pas mieux depuis l’implantation de celle-ci comme le confirme un premier bilan présenté à la Table de pilotage. Le ministère de l’Éducation, du Loisir et des Sports (MELS) doit prendre la véritable mesure de cet échec. En 2004, selon le CRIRES (Centre de recherche et d’intervention sur la réussite scolaire), seulement 37 % des enseignantes et des enseignants évaluaient que les performances des élèves s’étaient améliorées dans les champs d’apprentissage. En 2006, selon l’enquête du MELS, seulement 24 % des enseignantes et des enseignants pensent que les élèves réguliers réussissent mieux à l’école et cette proportion baisse à 10 % lorsqu’il est question des élèves ayant des besoins particuliers.

La FSE, qui a retenu pour thème de cette Journée des enseignantes et enseignants Parce que j’aime enseigner je me bats pour une école de qualité, procède dans cet esprit à une consultation auprès de ses membres. Elle s’attend à ce qu’elle débouche, notamment, sur la remise en question de l’évaluation des apprentissages par cycle, pour ramener cette évaluation et la promotion sur une base annuelle comme on l’a fait récemment en Suisse. Elle préconise aussi de surseoir au développement de la réforme pour que se tienne une réflexion publique d’envergure, sans complaisance, sans faux-fuyant et sans délai, et sans écarter la possibilité de faire marche arrière.

Désarroi des enseignantes et des enseignants du privé

Le sentiment est partagé par la présidente de la FPEP, Mme Francine Lamoureux, qui confirme que les enseignantes et les enseignants du secteur privé éprouvent du désarroi à l’égard de la réforme en cours et de la condition enseignante dans son ensemble.

 » La tâche des enseignantes et des enseignants s’alourdit constamment dans le cadre de l’implantation d’une réforme où à peu près tous et chacun ont de la difficulté à s’y retrouver. Nous en sommes rendus à un point où plusieurs se questionnent sur leur propre capacité d’enseigner. Il est évident que si des moyens concrets ne sont pas pris pour revaloriser cette profession, il deviendra de plus en plus difficile d’attirer une relève comme de retenir les jeunes qui sont déjà dans la profession « , déplore Mme Lamoureux.

Un réseau collégial sous-financé

De son côté, le président de la FEC, M. Mario Beauchemin, dépeint un portrait de la condition enseignante au collégial qui n’est guère mieux.

 » Depuis une quinzaine d’années, des transformations majeures ont affecté la pratique de la profession enseignante au collégial. Ces nombreuses modifications ont non seulement modifié en profondeur la nature de l’exercice de la profession, mais elles ont également eu pour effet d’augmenter considérablement la tâche des enseignantes et des enseignants de cégep. Bien que ces derniers continuent d’accomplir leur travail avec professionnalisme, il est grand temps que les pouvoirs publics et la société en général reconnaissent leur contribution importante à la formation de nos jeunes et qu’on leur donne des ressources supplémentaires qui sont devenues grandement nécessaires « , explique M. Beauchemin.

Nécessité d’une augmentation significative du financement

Les dirigeants syndicaux pensent donc que le temps n’est plus au discours en éducation au Québec, mais à l’action. Le développement d’une éducation publique de qualité passe nécessairement par l’adoption urgente de diverses mesures à commencer par une augmentation significative du financement de l’éducation publique, si l’on veut mettre fin à la dégradation en cours.

 » Les enseignantes et les enseignants du Québec ne peuvent plus continuer à porter à bout de bras l’éducation publique sans véritable soutien et ressources. On fera toutes les réformes que l’on voudra, mais si l’on ne s’assure pas que les principaux artisans ont entre les mains les moyens et les ressources pour mener à terme la mission qui leur est confiée, on court directement à un échec. Les États généraux sur l’éducation demandaient un financement à hauteur de 8,5 % du PIB comparativement à 7,5 % comme c’est présentement le cas. Cet écart constitue un manque à gagner d’environ 1 milliard de dollars, écart qui doit être comblé si l’on veut assurer une éducation publique de qualité « , soutient M. Réjean Parent.

D’autres mesures réclamées

Parmi les autres revendications de la CSQ et de ses fédérations, on retrouve la mise en place d’une véritable politique en faveur des élèves provenant des milieux défavorisés, l’organisation d’une campagne nationale de valorisation de l’éducation publique et des métiers de l’éducation, l’instauration de mécanismes de soutien au nouveau personnel favorisant le transfert et le partage intergénérationnel, des ressources de soutien en qualité et en nombre suffisant, la stabilisation des emplois et l’accès à des mesures de formation appropriées.

Une grande opération pour redonner la parole au personnel de l’éducation

Par ailleurs, M. Réjean Parent affirme que dix ans après la tenue des États généraux sur l’éducation, le temps est venu de redonner la parole au personnel de l’éducation.

 » La CSQ s’apprête à lancer une importante campagne auprès de l’ensemble de ses membres pour partager sur les stratégies et les moyens à mettre en œuvre pour assurer une éducation publique de qualité, juste et égalitaire. Au cours de notre congrès au mois de juin dernier, les délégués présents ont exprimé la volonté que le personnel de l’éducation prenne la place qui lui revient dans les débats qui ont cours sur l’éducation et nous avons bien l’intention de lui en fournir l’occasion « , explique M. Parent.

La CSQ s’apprête donc à lancer une vaste campagne de consultation et d’animation en faveur de l’éducation publique qui devrait s’étendre sur une période de trois ans.

 

Renseignements : Claude Girard

Attaché de presse CSQ

Tél. cell. : 514 237-4432

 

Jean Laporte

Attaché de presse FSE

Tél. cell. : 418 563-7193