Allocution de Josée Scalabrini lors de la Conférence de l’IE

29 mai 2014

Enseignement de qualité : Stratégies pour garantir aux enseignantes et enseignants une formation et un développement de qualité

À la FSE, nous croyons qu’il est essentiel que notre société tout entière reconnaisse la valeur du travail de nos enseignantes et enseignants et le rôle important qu’ils jouent dans la construction de notre avenir collectif. Depuis plusieurs années d’ailleurs, la FSE fait de la valorisation de la profession enseignante une grande priorité.

Certes, une formation solide et un développement professionnel sont des éléments importants d’un enseignement de qualité, puisqu’ils permettent d’analyser et d’enrichir les pratiques pédagogiques en vue d’améliorer l’apprentissage et la réussite des élèves. Ils sont aussi indissociables d’une affirmation et d’une reconnaissance forte du professionnalisme et de l’expertise des enseignantes et enseignants. En outre, l’Entente nationale entre le gouvernement et la FSE prévoit déjà un chapitre consacré au perfectionnement qui détermine les ressources financières allouées à ce titre.

Cependant, la formation et le développement professionnel ne doivent pas être considérés comme les seuls gages d’un enseignement de qualité ni comme une solution miracle à toutes les problématiques. Ce serait une erreur puisqu’on ferait nécessairement l’économie de l’analyse des autres facteurs qui influencent la qualité de l’enseignement tels que les caractéristiques sociales, économiques et familiales des élèves, le nombre d’élèves par classe, la composition de la classe, les programmes de formation, la précarité, les compressions budgétaires en éducation, etc.

Au Québec, nous pouvons constater, ces dernières années, qu’il y a une forte tendance à attacher un enseignement de qualité à la formation et au perfectionnement du personnel enseignant. Ce lien étroit invite à la prudence puisqu’il encourage la pensée magique de « l’effet enseignant » en guise de panacée à plusieurs problématiques scolaires et fait porter sur les seules épaules du personnel enseignant la réussite et la qualité de l’enseignement. La tentation en est d’autant plus forte en période d’austérité économique et de grandes compressions.

Par ailleurs, dans le système scolaire québécois, on observe actuellement une certaine promotion de la formation continue portant sur des pratiques pédagogiques dites exemplaires, et ce, par des dirigeants scolaires et certains universitaires. Cela désincarne l’objectif de la formation et du développement professionnel en voulant faire du personnel enseignant des « exécutantes et exécutants » de pratiques pédagogiques précises inscrites à l’intérieur de plan de réussite dans une gestion de l’éducation axée sur les résultats.

Par une insistance sur des besoins en formation continue, il est aussi facile d’induire l’idée de lacune dans la formation pour expliquer certaines difficultés de l’école québécoise. À défaut d’investir, les dirigeantes et dirigeants sont tentés de regarder de plus près ce que fait le personnel enseignant ou les lacunes de sa formation.

Pourtant, pour avoir droit au brevet d’enseignement, les enseignantes et enseignants reçoivent une formation universitaire de 4 ans avec 700 heures de stage pratique. Cette formation est en outre structurée par un référentiel de douze compétences professionnelles qui servent aussi de balises pour évaluer la qualité de la formation universitaire. Quant à la formation continue, des dispositions locales et nationales en matière de perfectionnement sont aussi prévues. Une enquête portant sur les pratiques et les besoins en formation continue est d’ailleurs en cours et permettra d’orienter les prochaines négociations en vue du renouvellement de la prochaine Entente nationale. 

Pour la FSE, c’est le personnel enseignant qui est le mieux disposé pour procéder à l’identification de ses besoins de développement professionnel. Une formation de qualité requiert ainsi un processus individuel et collectif qui se réalise d’autant mieux lorsqu’un environnement de liberté et de confiance est maintenu dans les établissements.

En plus de réclamer le soutien du gouvernement et des employeurs sous forme de formation et de temps d’appropriation lors de l’implantation de nouveaux programmes, de réforme ou encore de l’intégration des élèves en difficulté en classe ordinaire, la FSE identifie et revendique des conditions qui favorisent une formation et un développement professionnel de qualité.

Elle réclame une formation continue et un développement professionnel qui ne soient pas imposés. Actuellement, tout le monde dicte aux enseignantes et enseignants quoi faire et comment le faire. Ces derniers sont pourtant des professionnels de l’enseignement qui démontrent une préoccupation constante d’analyser et d’enrichir leurs pratiques pédagogiques afin, bien entendu, d’améliorer l’apprentissage et la réussite de leurs élèves. Ils ont aussi l’expertise pour identifier leurs besoins de formation, le moment où ils en ont besoin et les modèles de développement professionnel qu’ils souhaitent privilégier en lien avec la réalité de la classe et l’évolution des savoirs. Il n’y a pas d’engagement réel des enseignantes et enseignants sans liberté, sans confiance, sans reconnaissance de leur expertise et sans la conviction de détenir un certain pouvoir dans le processus. La participation réelle du personnel enseignant aux décisions à chacune des étapes du processus de formation et de développement professionnel est un élément essentiel. Après tout, c’est de leur profession qu’il est question.

La FSE revendique aussi une formation et un développement professionnel accessibles au personnel enseignant à statut précaire (le taux de précarité au Québec est de plus de 45 %). À cet égard, elle rappelle au gouvernement qu’il faut améliorer l’accès au perfectionnement pour les enseignantes et enseignants à statut précaire et que les ressources nécessaires doivent être ajoutées. Elle a de plus réclamé que le gouvernement adopte une politique nationale d’insertion professionnelle dotée d’un financement distinct du perfectionnement et qui respecte le principe de l’autonomie professionnelle du personnel enseignant. Elle en a d’ailleurs proposé les grands principes directeurs.

Enfin, la FSE réclame une formation et un développement professionnel qui donnent le temps pour connaître, pour adhérer, pour expérimenter, pour s’approprier et pour en mesurer les impacts.

Pour conclure, dans plusieurs pays, un enseignement de qualité par du personnel bien formé et qualifié demeure un défi. Au Québec, le défi se pose différemment. Certes, il est important de poursuivre nos réflexions sur la qualité de l’enseignement et de la formation initiale ou continue, puisque cela demeure toujours perfectible. Cependant, il faut faire attention de ne pas faire porter tous les aspects d’un enseignement de qualité seulement sur la formation. En effet, d’autres enjeux déjà mentionnés influencent aussi la qualité de la formation.

La FSE veille à rappeler au gouvernement qu’investir dans l’éducation c’est rehausser sa qualité, c’est valoriser la profession enseignante, c’est voir loin et c’est préparer l’avenir.

Merci !