Manifestation et moyens de pression

16 octobre 2001

Les enseignantes travailleraient au-delà de six heures de trop par semaine

Montréal, le 16 octobre 2001 – Plus de six heures de travail de trop par semaine, et qu’il refusera de rémunérer, c’est le résultat de la vision aberrante que le gouvernement du Québec entretient du travail des enseignantes et enseignants des commissions scolaires. Dans la semaine du 24 septembre, le personnel enseignant de toutes les commissions scolaires du Québec a été appelé à mesurer le temps réellement effectué, et à le comparer à la nouvelle notion de « temps requis » pour effectuer la tâche que le gouvernement veut introduire pour limiter sa reconnaissance de la durée du travail enseignant.

De façon prévisible, puisque les données recueillies par les enseignantes et enseignants s’inscrivent dans les grands paramètres de toute une série d’études sur le sujet, il s’avère une fois de plus que les chiffres du gouvernement ne tiennent pas la route et sous-estiment systématiquement la durée réelle du travail enseignant.

« Faudra-t-il que nos membres s’en tiennent à ce que l’employeur attend d’eux, pour démontrer, par l’absurde, toute la mesquinerie, toute la malhonnêteté de sa vision du travail enseignant ? » se sont demandés Johanne Fortier, présidente de la Fédération des syndicats de l’enseignement (CSQ) et Pierre Weber, président de l’Association provinciale des enseignantes et enseignants du Québec, qui représentent tout le personnel enseignant des commissions scolaires francophones et anglophones du Québec.

L’enjeu de la durée

Les réponses données la semaine dernière au comité paritaire technique par les représentants du gouvernement constituent à toutes fins pratiques des fins de non-recevoir, tant sur la reconnaissance de la durée du travail enseignant que sur la valeur de l’emploi. Dans les faits, l’employeur veut se borner à ne reconnaître que 90 % du temps réellement effectué par le personnel enseignant, et à lui attribuer un rangement qui ne correspond pas à la valeur de l’emploi.

Or, les études sur la durée du travail enseignant n’avaient d’autre but que de démontrer que les enseignantes et enseignants ne travaillent pas moins d’heures, sur une base annuelle que leurs collègues à qui il fallait les comparer du point de vue de la valeur de l’emploi. Depuis 1996, le gouvernement s’est employé à saper les résultats de l’étude conjointe qui l’affirmait, mais une récente batterie d’experts, choisis par les parties, est venue valider tant la méthode que les résultats observés. D’où la nouvelle notion que le gouvernement veut introduire de « temps requis » pour effectuer le travail, qui lui permettrait de ne reconnaître que le temps qu’il croit approprié pour accomplir le travail enseignant. À titre d’exemple : même si les rencontres avec les parents occupent en moyenne 27 heures dans l’année de l’enseignante ou l’enseignant, le gouvernement croit que 20 heures suffiraient, et baserait la rémunération sur ces 20 heures.

Outre la durée, le différend porte encore sur la valeur de l’emploi et sur la définition de la catégorie d’emploi. Malgré les critères objectifs et clairs prévus à la Loi de l’équité salariale pour définir ce que constitue une catégorie d’emploi, le gouvernement cherche à différencier le travail des enseignantes et enseignants des commissions scolaires de celui effectué dans les collèges.

La pression monte

À cinq semaines de l’échéance que le gouvernement a fixée aux employeurs du Québec pour réaliser l’équité salariale, la pression monte chez les enseignantes et enseignants des commissions scolaires. Il est de plus en plus clair que depuis l’entente provisoire de décembre 1999, qui devait permettre la poursuite des travaux en équité salariale pour en arriver à une reconnaissance complète de la valeur et de la durée du travail enseignant, la partie patronale n’a pas fait l’exercice avec toute la diligence et la rigueur que commandait ce dossier.

Les syndicats locaux de la FSE et de l’APEQ ont commencé à présenter à leurs commissions scolaires une facture symbolique des coûts de rémunération non pris en compte par l’approche réductrice du gouvernement. Les délégués ont commencé à réfléchir avec les membres à la riposte qui devrait être servie au gouvernement s’il devait dans les prochaines semaines poser des gestes qui concrétiseraient sa reconnaissance partielle du travail enseignant, tant sur sa valeur que sur sa durée. Rien n’est exclu de cette réflexion, ni les boycotts, ni les arrêts de travail.

Une grande manifestation est prévue à Québec samedi prochain, le 20 octobre, à laquelle sont aussi conviés les membres de la Fédération des enseignantes et enseignants de cégeps (CSQ), sous le thème de la reconnaissance de la durée du travail enseignant.

Dans les semaines du 22 et du 29 octobre, les membres de la FSE et de l’APEQ seront appelés à se prononcer sur une radicalisation de l’action, selon les recommandations du Conseil fédéral du dimanche 21 octobre. L’objectif : faire pression sur le gouvernement dans les décisions qu’il s’apprête à prendre dans le dossier d’équité salariale des enseignantes et enseignants. Le ministère de l’Éducation et tout le gouvernement doivent prendre la mesure des risques dramatiques qu’ils font courir au système d’éducation s’ils devaient formaliser leur intention de ne reconnaître le travail enseignant qu’à une fraction de sa valeur.

En invitant toutes les enseignantes et tous les enseignants du Québec à se solidariser autour du plan d’action des syndicats de la FSE et de l’APEQ, Johanne Fortier et Pierre Weber réaffirment que le dossier des enseignantes constitue un vrai test pour le gouvernement et pour la loi de l’équité salariale. « Si les enseignantes, avec leurs effectifs importants et le fait qu’elles sont très majoritairement syndiquées, ne peuvent obtenir une rémunération juste, non discriminatoire, malgré la loi  » la plus progressiste du monde  » (sic), nous ne pourrons conclure autrement que ce gouvernement ne respecte pas ses engagements, et qu’il ne tient que des discours creux et cyniques. Nous ne croyons pas qu’il ait ces moyens et nous souhaitons qu’il nous entende d’ici le 21 novembre. »

Pour information :

Jean Laporte, FSE
418-649-8888 (bureau)

Ronald Hughes, APEQ
514-694-9777 (bureau)