Une table de pilotage de la réforme, sans les enseignantes et enseignants
19 juin 2003
Une aberration
Québec, le 19 juin 2003. — Les enseignantes et enseignants ne sont pas dupes des phrases creuses qui émaillent les communiqués du ministère de l’Éducation aujourd’hui, telle « le plan de mise en œuvre… se veut une démarche dynamique qui respectera et impliquera encore plus les acteurs de la réforme ». À l’évidence, le « partenariat renouvelé entre le ministère et les commissions scolaires dans la mise en œuvre de la réforme » exclut les premiers intervenants visés, soit les enseignantes et enseignants, qui ne seront pas à la table de pilotage dont ils avaient pourtant recommandé la mise sur pied le 21 mai dernier.
Pour la présidente de la Fédération des syndicats de l’enseignement, Johanne Fortier, il s’agit d’une erreur tactique d’importance. Ce sont les enseignantes et enseignants, leurs syndicats et leur Fédération qui les premiers s’étaient érigés en chien de garde de la mise en place correcte de la réforme des programmes au primaire. La FSE avait dénoncé l’improvisation, le manque de formation et de matériel et dévoilé des sondages qui faisaient état du scepticisme du personnel enseignant, notamment sur l’impact possible de la réforme sur l’amélioration de la réussite scolaire. Le MEQ y était par la suite allé de ses propres études, avec des résultats similaires.
Les enseignantes et enseignants avaient donc bien mérité leur droit de participer à la création et aux travaux de la Table de suivi de l’implantation de la réforme. Des sommes avaient été dégagées pour assurer une mise en place plus ordonnée et mieux préparée. D’autres pourparlers étaient en cours pour éviter qu’on répète au secondaire les erreurs du primaire.
Lors d’une première prise de contact avec le nouveau ministre de l’Éducation, le 21 mai, la représentante de la Fédération des syndicats de l’enseignement avait senti une écoute attentive et le respect des positions défendues par la FSE, qui ne se reflètent pas dans les annonces d’aujourd’hui. Pour assurer une expérimentation rigoureuse de la réforme au secondaire, la Fédération avait suggéré « la création d’un comité conjoint de validation qui aurait pour but d’encadrer le travail d’expérimentation, produire un bilan et présenter, s’il y a lieu, les orientations et ajustements nécessaires ». Or la table de pilotage du ministre, si elle a des mandats comparables, en exclut ses premiers artisans.
50 millions sur six ans ?
Le ministre annonce aussi, sans autre détail, vouloir consacrer sur six ans 50 millions de dollars à la formation adéquate des acteurs concernés, particulièrement les enseignantes et enseignants. La FSE tient à rappeler que déjà le MEQ s’était engagé à injecter 10 millions de dollars par année, sur une base récurrente, pour la formation des divers intervenants (personnel enseignant, professionnel et de direction) pour la mise en place et le soutien de la réforme au primaire. De plus, une somme de 2,5 à 3 millions de dollars avait été dégagée sur une base annuelle, pour des mesures de soutien et d’accompagnement du personnel enseignant seulement.
La FSE avait aussi entamé des discussions pour évaluer la hauteur des sommes nécessaires pour assurer la formation des enseignantes et enseignants du secondaire pour la réforme. Un sous-comité de la Table de suivi de la réforme (le comité Dumont) recommandait d’ailleurs en mars, pour le primaire, « le maintien et la croissance des sommes globales allouées à la formation », et d’ajouter pour le secondaire « le même niveau de financement… dans une perspective pluriannuelle ».
Sans connaître la ventilation des 50 millions de dollars annoncés, la FSE peut d’ores et déjà affirmer que le compte n’y est pas, d’autant que de l’avis de tous l’implantation de la réforme au secondaire devra relever des défis plus exigeants qu’au primaire.
Les enseignantes et enseignants du Québec, à titre de premiers concernés, ont développé l’habitude d’intervenir utilement et souvent publiquement sur les questions d’ordre pédagogique. La nouvelle attitude du ministère de l’Éducation qui semble moins enclin à les écouter ne les empêchera pas de continuer à le faire, et de plus en plus publiquement si les autres canaux sont moins praticables.
Pour information : Jean Laporte, attaché de presse de la FSE
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