Abolir la licence en formation professionnelle – Une décision qui accentuera la pénurie

22 avril 2022

La plupart des secteurs et des régions du Québec sont aux prises avec d’importantes pénuries de main-d’œuvre. Alors que les employeurs cherchent désespérément des travailleurs qualifiés, le ministère de l’Éducation vient de mettre à mal l’un des principaux outils pour combattre la rareté de ressources humaines, soit le réseau de la formation professionnelle (FP). Elle repose principalement sur l’expérience des enseignantes et enseignants qui contribue à l’apprentissage et la réussite des élèves. Elle est un formidable secteur de qualification, mais le gouvernement vient de lui ajouter une épine au pied avec les modifications qu’il a apportées au Règlement sur les autorisations d’enseigner (RAE).

À force de représentations auprès du gouvernement, on a réussi à faire corriger plusieurs des problèmes et des incohérences du RAE. Il reste cependant un enjeu majeur : l’abolition de la licence d’enseignement.   

Il est important de bien comprendre la réalité d’un enseignant de la FP. Pour obtenir une autorisation d’enseigner en FP, il faut détenir une formation disciplinaire pertinente et une expérience conséquente du métier. Il faut aussi progresser dans la réussite de crédits du bac en enseignement professionnel. Il est aussi bon de rappeler que la profession la plus proche de l’enseignement professionnel, soit l’enseignement technique au cégep, n’exige aucune formation pédagogique.

L’abolition de la licence d’enseignement force maintenant des professeurs ayant 10, 15 ou même 20 ans d’expérience en enseignement à retourner à sur les bancs d’école. Plusieurs y voient, avec raison, une rupture de contrat de la part du gouvernement. Le nouveau règlement exige que ces enseignants d’expérience complètent 30 crédits de formation pédagogique générale, alors que leurs 90 crédits ont déjà été acquis. Ajoutons à cela que les règlements des universités prévoient un maximum de 10 ans pour terminer un programme d’études et qu’avec les changements apportés aux différents programmes au fil du temps, des crédits déjà obtenus ne sont plus reconnus et doivent être acquis de nouveau!

On s’explique mal l’entêtement du gouvernement. Comme c’est trop souvent le cas, il est possible que le ministère de l’Éducation ait tenté de calquer la situation du secteur des jeunes à celui de la FP.

Le ministre doit revenir sur cette décision mal avisée et rétablir la licence d’enseignement avec les mêmes conditions de renouvèlement qui prévalaient avant la modification du RAE. Nos collègues du réseau anglophone ont une expression qui convient parfaitement à cette situation : « If it ain’t broke, don’t fix it ». Autrement dit, s’il n’y avait rien de cassé, il n’y a rien à réparer.

 

Josée Scalabrini, présidente de la FSE-CSQ