Modifier le PEQ pour consolider la formation professionnelle

20 novembre 2019

Devant la levée de boucliers provoquée par le projet improvisé de révision du Programme de l’expérience québécoise (PEQ), le gouvernement a décidé de le mettre sur la glace. La Centrale des syndicats du Québec (CSQ) a été aux premières loges de cette opposition en décriant les effets négatifs de cette réforme, notamment pour des centres de formation professionnelle. Elle excluait des programmes avec un taux de placement très élevé, comme celui de soutien informatique.

Sans surprise, tant les acteurs du milieu de l’éducation que du milieu économique ont poussé un soupir de soulagement à l’annonce de ce report. Mais ne nous leurrons pas, il s’agit d’une pause pour réévaluer le projet. En effet, la refonte de tout le système d’immigration est dans la mire du gouvernement et, ne l’oublions pas, fait partie de ses engagements phares. Il est donc essentiel de rester à l’affût.

Je profite de la période de réflexion que s’offre le gouvernement pour lui rappeler l’importance de la formation professionnelle (FP) au Québec. Les différents programmes offerts en FP forment plus de 125 000 élèves chaque année. Ces personnes diplômées occupent par la suite des emplois bien rémunérés et participent à l’essor économique de toutes les régions du Québec. Malgré cet apport considérable, le Québec vit une pénurie de main-d’œuvre qui tend à se généraliser.

Dans ce contexte, les entreprises embauchent des travailleuses et travailleurs même sans formation. Par conséquent, les inscriptions en FP diminuent. Ainsi, n’ayant pas le nombre d’élèves minimal pour démarrer une cohorte, des programmes ne sont plus offerts et d’autres sont en péril.

On se retrouve donc avec des personnes qui voudraient être formées, mais ne le peuvent plus et avec des entreprises qui cherchent des diplômés, mais ne les trouvent pas. La Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE-CSQ) réclame à ce sujet une bonification du financement des petites cohortes, pour maintenir une offre de formation diversifiée sur l’ensemble du territoire québécois.

Pour vibrer au diapason des régions, le gouvernement doit porter une attention particulière aux modifications qu’il proposera au PEQ. Les mesures qu’il mettra en place doivent augmenter les inscriptions et la diplomation en FP. Le nombre d’heures d’une formation est un mauvais critère pour déterminer la pertinence d’inclure un programme dans le PEQ. Par exemple, en fixant à 900 heures la durée minimale de formation, on met à l’écart des programmes comme celui menant au métier de préposé aux bénéficiaires. De plus, établir une liste de formations admissibles est à proscrire.

Celle-ci relèverait de l’arbitraire et restreindrait trop de programmes. En effet, seulement 37 DEP et 3 ASP étaient dans la liste du ministre proposée dans la réforme, alors qu’il en existe plus de 150. Par le fait même, cette dernière excluait des formations menant à des métiers qui se trouvent sur la liste des 153 métiers les plus prometteurs actuellement sur le site d’Emploi-Québec, par exemple : assistance dentaire, conduite de camion, conduite d’équipement lourd, électricité, conseil et vente de pièces d’équipement motorisé, mécanique automobile, mécanique d’engins de chantier, production textile (opérations), mode et confection de vêtements sur mesure, soutien informatique, etc.

Pour assurer la qualité de la formation reçue par les étudiantes et étudiants étrangers, la FSE-CSQ propose plutôt au gouvernement de spécifier que seuls les diplômes reconnus par le ministère l’Éducation et de l’Enseignement supérieur (MEES) soient admissibles. Par ailleurs, le MEES a déjà la responsabilité, en collaboration avec le ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale (MESS), de déterminer l’offre de formation professionnelle en fonction des besoins du monde du travail.

Avec le retrait de son projet, le gouvernement a la possibilité d’élargir les critères menant au PEQ. Il aura ainsi l’occasion de consolider son réseau de FP en y favorisant les inscriptions, tout en répondant aux besoins de formation de main-d’œuvre. Cette semaine, une centaine d’enseignantes et d’enseignants de la FP de toutes les régions étaient réunis en réseau pour analyser les orientations à prendre pour améliorer la FP. La FSE-CSQ s’en inspirera pour proposer des solutions directement venues du personnel enseignant sur le terrain.

Josée Scalabrini
Présidente de la FSE-CSQ