Le silence n’est pas une option

29 mai 2019

Depuis quelques jours, des commentateurs se plaisent à dépeindre les enseignantes et enseignants et leurs représentants comme des plaignards ou des chialeux. Se cachant derrière une forme d’admiration envers le personnel enseignant, ils ajoutent plutôt une couche de préjugés sur tous ceux circulant déjà, contribuant ainsi à la dévalorisation de notre profession.
Est-ce être plaignards que d’entendre le cri du cœur des profs et de le faire connaitre à la population? Je crois que non. Qu’est-il exactement, ce cri du cœur? Ils sont à bout de souffle de subir les contrecoups des compressions budgétaires et qu’on leur impose des solutions à des problèmes qui ne sont pas les priorités du milieu de l’éducation, mais qui répondent davantage à la volonté d’un gouvernement qui est plus intéressé par la réalisation de ses promesses électorales que par les besoins des milieux. L’entêtement du ministre dans son projet de maternelle 4 ans mur à mur en est un bon exemple. Si nous lui disons que ce n’est pas la priorité pour le réseau, c’est que nous connaissons la réalité du milieu et nous nous en faisons la voix. De plus, les profs répètent qu’ils n’en peuvent plus qu’on leur ajoute des responsabilités pour pallier le manque de services pour leurs élèves. Alors, quand le gouvernement annonce des récréations obligatoires, des apprentissages à la sexualité ou autres ajouts qui retombent dans leur cour, ce n’est pas par simple nonisme que nous n’applaudissons pas ces annonces. N’en déplaise à nos détracteurs, bien que nous reconnaissions que ces mesures sont bénéfiques pour les élèves, comme représentants, nous devons transmettre le cri du cœur des enseignantes et enseignants qui en subissent les contrecoups. Si on veut faire de l’éducation une priorité, on doit nécessairement travailler avec celles et ceux qui sont en première ligne dans le réseau.
Malgré leur fatigue et leurs frustrations, les enseignantes et enseignants sont motivés, aiment leur métier, sont passionnés et sont prêts à tout donner pour leurs élèves. Ils sont engagés dans leur réussite et se sentent gratifiés par chacun des petits et grands succès. Parce qu’ils sont fiers de ce qu’ils font, ils nous demandent également de valoriser leur profession. Et c’est aussi ce que nous faisons avec force et conviction! La FSE-CSQ a mis en place, en 2012, la campagne Prof, ma fierté! qui vise à mettre en lumière l’extraordinaire travail des enseignantes et enseignants. Depuis sa création, des capsules ont été diffusées à la télévision. Dans les dernières années, la campagne a pris la forme notamment d’une websérie, diffusée sur sa page Facebook. Les épisodes ont été vus au total 1,5 million de fois!
Les 9 et 10 mai derniers, 500 enseignantes et enseignants ont participé au colloque Maîtres de notre profession, où nous avons travaillé ensemble à consolider nos positions et aussi à trouver des solutions émanant du terrain au bénéfice de notre réseau. Chaque fois que le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur nous interpelle pour avoir notre avis et collaborer, nous répondons présents, travaillons activement avec lui et proposons des solutions. Des chercheurs en éducation sollicitent notre contribution dans leurs projets et c’est avec plaisir que nous leur ouvrons nos portes pour permettre l’amélioration de nos pratiques et du lien existant entre la recherche et le terrain.
Si décrier ce qui ne fonctionne pas en éducation, réclamer qu’on écoute davantage les enseignantes et enseignants ou encore contribuer à trouver des solutions et mettre en valeur leur travail extraordinaire est considéré comme être plaignards, eh bien, je vous le dis : j’en suis fière, parce que je sais que c’est ce qu’ils nous demandent. Dans ce contexte, c’est plutôt le silence, l’inaction et la complaisance qui sont intolérables.
Josée Scalabrini, présidente de la FSE-CSQ