Élèves handicapés ou en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage (EHDAA)

Communiqué de presse
Plus de 30 000 élèves en difficulté en attente de services
Québec, le 27 octobre 1999. — Depuis la rentrée, les enseignantes et enseignants ont signalé aux administrations scolaires plus de 30 000 nouveaux cas d’élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage, selon une procédure prévue à leur convention collective. Jusqu’ici c’est moins d’un cas sur cinq qui a fait l’objet d’étude par les comités qui doivent se réunir dans les 15 jours. C’est dire que pour la grande majorité de ces élèves, les plans d’intervention adaptés à chacune des situations tarderont à se réaliser.
Les détails de ces chiffres, pour chacun des 44 syndicats locaux de la Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE-CEQ) et pour ceux de l’Association provinciale des enseignantes et enseignants du Québec (APEQ) ont été dévoilés ce matin par la présidente de la Fédération, Johanne Fortier, et par Pierre Weber, président de l’Association.
La vaste opération mise en place par les syndicats d’enseignantes et d’enseignants visait à signaler tous les cas d’élèves qui ont besoin d’interventions adaptées, même si les enseignants se font dire qu’il n’y a plus de ressources financières ou que les quotas sont atteints ou dépassés.
Pour Johanne Fortier, " seule la connaissance du portrait précis de la situation permettra d’en saisir l’ampleur et de dégager les ressources adéquates ". Actuellement les commissions scolaires se voient attribuer un " taux de normalisation " qui servira à établir le financement requis. Mais ce taux, qui varie de 7,5 % à 14 %, est souvent en deçà du pourcentage d’élèves en difficulté déjà identifiés.
Avec l’intégration de plus en plus massive en classes ordinaires des élèves en difficulté, la tâche du personnel enseignant se trouve encore alourdie, parce que les effectifs spécialisés (enseignants en orthopédagogie et professionnels) n’ont pas été ajustés en conséquence. Au contraire, ils ont même légèrement diminué chez certaines catégories de personnel en lien direct avec les élèves, dont les psychologues. De 1990-1991 à 1997-1998, le pourcentage d’élèves affichant des difficultés graves d’apprentissage, intégrés en classes ordinaires, est passé de 29 % à 42 %. Ce taux est passé de 46 % à 56 % chez les élèves éprouvant des difficultés d’ordre comportemental, et de 15 % à 25 % chez ceux touchés par une déficience intellectuelle légère.
Mais comme le souligne Pierre Weber, « plus important que l’alourdissement de la tâche, il y a la situation souvent dramatique des enfants qui ne reçoivent pas les services auxquels ils ont droit et que leur situation nécessite rapidement. Si le dépistage précoce est primordial, pour éviter qu’un élève ne prenne l’école en grippe, encore faut-il que les mesures d’appui requises soient rapidement disponibles, ce qui n’est pas le cas. »
Selon les chiffres de 1998, la situation ne s’est guère améliorée depuis l’intervention du Conseil supérieur de l’éducation, en 1996. Par exemple, on a ajouté 7 orthophonistes aux 202 dont 45 % travaillaient dans six écoles ou plus. Les psychologues, dont le quart travaillaient dans six écoles ou plus ont été réduits de 3,5 %.
La principale demande des enseignantes et enseignants francophones et anglophones, au cours de l’actuelle ronde de négociation, c’est l’engagement, dans chaque commission scolaire, de ressources spécialisées pour fournir les services adéquats à tous les élèves qui en ont besoin, des besoins auxquels le personnel enseignant ne peut répondre seul. Outre les enseignants en orthopédagogie, nous demandons aussi l’ajout de professionnels et de personnel de soutien : des orthophonistes, des psychologues, des ressources en psychoéducation et en éducation spécialisée, du personnel en travail social et des préposés aux élèves handicapés.
Jusqu’ici les négociateurs patronaux font la sourde oreille. Les offres en EHDAA, déposées au début de septembre, 16 mois après le dépôt syndical, reposent sur un déplacement des ressources des élèves handicapés vers les élèves en difficulté. Le gouvernement propose une augmentation du nombre d’élèves dans les classes spéciales et une diminution des services aux élèves handicapés. Il veut aussi que l’identification des élèves en difficulté soit laissée à la discrétion des directions d’école et supprimer les délais de mise en œuvre des plans d’intervention.
La proposition patronale vient également substituer une vague notion « d’appui à l’intégration » aux règles plus formelles de pondération du nombre d’élèves en difficulté intégrés aux classes ordinaires et aux mesures de soutien direct à l’élève.
Pour Johanne Fortier et Pierre Weber, l’insensibilité du gouvernement aux besoins des élèves en difficulté ou handicapés, témoigne d’une vision à courte vue. « Il faut cesser de considérer les sommes dévolues à l’éducation comme une dépense et les apprécier pour ce qu’elles sont, un investissement dans l’avenir de notre société. Les 13,5 M $ consentis l’année dernière par le ministère de l’Éducation, pour 130 000 élèves, apparaissent bien maigres au regard des 360 M $ que le gouvernement s’est empressé d’offrir à GM », a conclu Johanne Fortier.
Pour Pierre Weber, il faut rapidement dégager les sommes nécessaires, si on espère avoir un effet positif à moyen terme sur le taux effarant de décrochage scolaire, et sur la qualité de vie des élèves à l’école.
Comme dans les urgences d’hôpitaux, il y a dans les écoles des listes d’attente tout aussi intolérables même si leurs effets sont moins visibles et moins immédiats. Le laxisme dans l’un et l’autre cas entraîne des conséquences tout aussi dramatiques.
La FSE et l’APEQ négocient en cartel et représentent tout le personnel enseignant (tant francophone qu’anglophone) des commissions scolaires du Québec. Leurs demandes sont identiques pour assurer des services adéquats aux élèves en difficulté.
Pour information :
Jean Laporte, FSE (CEQ)
(418) 649-8888, poste 3107
Ronald Hughes, APEQ
1 800 361-9870